El peor programa de la semana, La buena vida, Obra maestra, Soldados de Salamina, Bienvenido a casa, ¿Qué fue de Jorge Sanz?, Madrid 1987, Vivir es fácil con los ojos cerrados… Qu’importe cinéma ou télévision, le curriculum de David Trueba ne demande pas plus de présentation. Sa dernière production pour le grand écran s’intitule Casi 40, un road-movie qui nous entraîne dans les terres intérieures de l’Espagne et où les deux personnages, Lui et Elle (interprétés par Fernando Ramallo et Lucía Jiménez) jettent un regard en arrière sur ce qu’a été leurs vies à l’âge indiqué par le titre. Lui est vendeur de cosméthiques: Elle a une vie stable, bien qu’elle garde toujours en elle son rêve d’enfant de devenir une chanteuse célèbre.
Avec leurs valises d’illusions et de vieux rèves, ils entreprennent une petite tournée de concerts où ils mettront à plat leur passé et ce qu’il leur reste à parcourir.
Cinq années se sont écoulées depuis Vivir es fácil con los ojos cerrados (Il est facile de vivre quand on a les yeux fermés), votre dernier film. A quoi est dû une telle attente ?
Une des raisons principales est que j’étais sur Tierra de campos, mon dernier roman et ces dernières années ont été importantes pour le terminer. Ensuite il y a aussi les difficultés habituelles que l’on rencontre en Espagne pour réaliser un film qui m’ont pris du temps pour faire ce que je veux et ce en quoi je crois.
Casi 40 part de ce moment où on est entrain de passer la frontière de cet âge. A 40 ans tout se termine ? Que reste-t-il ?
(Rires) Non, bien sûr que non. Les 40 ans sont comme toutes les tranches d’âge, rien ne se termine. Ce qu’il se passe c’est qu’à 40 ans, certaines personnes en viennent à se poser des questions sur où ils en sont, sur les rêves qu’ils ont accompli alors qu’ils sont à la moitié de leur vie. C’est la moitié du voyage. Il y a autant derrière que devant et c’est normal de se poser des questions importantes.
Le film a un ton aimable, un mélange de journal intime et de comédie, mais aussi il a un goût d’au revoir, le tout dans une ambiance assez années 80. Je pense ici à cette séquence où les personnages reviennent sur ce qu’ils étaient et aujourd’hui ne sont plus.
Disons que pour moi, cela est intrinsèque à l’expérience de la vie. C’est-à-dire que dans la vie, lorsqu’on avance dans une direction, c’est en laissant une autre derrière. Quand on observe ensuite sa vie personnelle, les deux sont présentes et je crois que c’est bien car il y a de la mélancolie et de l’ambition à la fois. Mais n’importe quelles exacerbations dans une des directions serait une erreur. Je crois plutôt qu’il y a un équilibre à avoir entre les deux. Effectivement lorsque quelqu’un, ou plutôt ici, l’un des personnages jette ce regard en arrière, il se rend compte au niveau social et personnel de toutes les choses qu’il a laissé derrière.
Une chose qui retient l’attention c’est que les personnages n’ont pas de prénoms. C’était une décision volontaire ?
C’est une décision volontaire qui naît de la question que beaucoup de gens se font concernant la relation entre La buena vida [premier long-métrage de Trueba, aussi interprétés par Lucía Jimenez e et Fernando Ramallo] et ce film. Je voulais que ce soient deux films indépendants et laisser aux spectateurs qui ont vu La buena vida, la possibilité de projeter ce qu’ils connaissent de ces personnages dans ce film. Et pour la plus grande majorité des spectateurs qui n’ont pas vu La buena vida, ils peuvent tout à fait comprendre et faire leur, ce nouveau film.
Malgré ce que vous dites, on voit réunit ici les deux mêmes acteurs. Il s’est passé plus de vingt ans depuis La buena vida. Comment s’est passé les retrouvailles avec eux ? E quoi avez-vous senti que vous aviez mûris, eux en tant qu’acteur et vous en tant que réalisateur, ainsi que votre relation ?
Ils sont fantastiques, et en général les acteurs sont comme le vin, ils s’améliorent toujours un peu plus. Je les ais connu jeunes, ils sortaient du lycée pour faire du cinéma. De fait aucun des deux n’avaient été acteurs à ce moment là alors qu’aujourd’hui ils le sont pleinement. De fait je les ai trouvé matures, professionnels et en même temps aspirant à retrouver la liberté et l’enthousiasme de leurs première fois. Et je crois leur avoir donné les conditions nécessaires pour qu’ils puissent se réaliser. Au mieux ils auraient été deux acteurs qui travaillent tous les jours ou faisant des films à succès,ça aurait été un travail plus fonctionnel. Mais comme ce n’était pas le cas, je crois que pour eux ce film a été un moyen de revenir vers leurs débuts, ce qui est ce que je dis quand on me demande quelle est mon moyen d’être enthousiaste au travail. Tant pour les romans que pour les films, j’essaie toujours de revenir à mes débuts, pour apprendre de nouveau.
Je ne sais pas si c’est un sujet mais on dit toujours que les personnages ont quelque chose à voir avec leur auteur. Quelle part de Lui et de Elle il y a en toi ou que tu reconnais ?
Oui, je crois que oui, en général celui qui écrit laisse des traces de lui-même dans tous les personnages qu’il invente. Le personnage de Lucía je le trouve assez proche parce que c’est une personne qui a une relation avec le monde professionnel et artistique assez sceptique et a toujours d’abord fait passer en premier lieu sa vie privée, c’est en cela que je me sens proche. Le personnage de Fernando m’est peut-être moins identifié mais il est vrai qu’au cours de ma vie j’ai rencontré ce genre de personnes qui ont cette espèce de sensation de déroute, comme si tout leur échappait. Mais ce que j’ai voulu dire avce ce film c’est que rien ne s’échappe de nos doigts, simplement que les choses ne sont pas comme on s’en souvient et que la vie est de se battre chaque jour.
Casi 40 s’échappe de l’environnement urbain et cherche cette Espagne de l’intérieur. C’est un recours argumental ou c’est une autre question que vous vouliez explorer avec ce paysage ?
Bien, disons qu’en principe je cherche d’abord à servir le propos du film, mais aussi j’ai toujours eu à coeur de montrer la richesse de notre pays. C’est-à-dire essayer de ne pas le résumer à Madrid ou Barcelone, mais montrer qu’il existe bien plus lorsque tu fais l’effort de sortir un peu… J’ai fait un film à Gérone, à Alméria et j’ai aimé incorporer ces éléments de richesse. Il m’a toujours couté un peu que nous soyons familiarisé avec le Wisconsin et que nous sachions rien de la Castille. De fait, c’est un film qui voyage entre Palencia et Plasencia et Salamanque et Ségovie etc. J’ai apprécié des éléments de ces villes qui ne sont pas vraiment typiques du cinéma. Très vite l’opportunité de faire un voyage dans ce coin est apparu, alors j’ai dit « Allons y ! »